Original?

Sommes-nous encore capables d'être curieux?


Je discutais avec une amie l'autre jour et elle me disait à quel point elle était affligée de constater le manque d'originalité dans le thème des bouquins qu'elle lisait. Ma copine est folle d'histoires d'amour! 

Je partis donc faire un tour sur les pages du site de téléchargement d'oeuvres numériques que je fréquente et je lui donnais assez vite raison.

 Que ce soit dans le choix de la couverture, du titre ou du thème, mieux vaut aimer les histoires de secrétaire-employée qui tombe amoureuse de son patron, milliardaire au caractère méprisant. Ou bien l'inverse, l'héritière- milliardaire- PDGère qui n'ose pas s'avouer qu'elle craque pour son jardinier-stagiaire-héritier bis.

Les décors sont fait de luxe, calme et bling bling.

Les héroïnes sont belles mais elles ne le savent pas (ou alors elles sont trop pauvres pour s'acheter un miroir) ( ou bien elles le savent mais elles sont trop timides!) et les héros sont gaulés comme des dieux (et là bizarrement, ils en sont conscients et sont en général d'odieux consommateurs de sexe sans pitié)!

  Et puis j'ai réalisé qu'il y avait parfois des histoires plus originales et je vais parler de ce que je connais: une héroïne pas si belle que ça, qui refuse de jouer les gourdes de service.

Un héros...bon d'accord, il est très beau, il le sait, c'est un joyeux queutard mais...ah! le mot important c'est JOYEUX. Il n'est pas méprisant, il est généreux de sa personne et il exerce un métier pas banal, nous y reviendrons plus tard!

  ELLE ne veut pas de lui parce qu'elle n'aime pas du tout ce qu'il fait.

  LUI, ne veut qu'elle parce qu'il n'a pas l'habitude des rebuffades.

  Le décor est surtout extérieur, pas de villa luxueuse, pas de voiture de sport mais...des chevaux (non, il n'est pas cowboy!). Pas de capitale trépidante non plus, une ville de province en plein été!

Jusque là, on peut dire que ça change de ce qu'on lit d'habitude. Je continue.

  Pour pimenter le tout, une série de meurtres vient mettre la pagaille dans notre tango amoureux.

  Pour donner un peu plus de vie à tout ça, imaginons alors une belle galerie de seconds rôles:

Un flic un peu pervers fan de série TV

Un viticulteur débonnaire à l'humour grivois

Un associé un peu stupide

Une sœur qui se prend pour Agatha Christie

Un chauffeur illuminé

Une psy très professionnelle

Un amoureux transi au casier judiciaire chargé

Pas mal non?

  Maintenant, rêvons d'une toile de fond insolite, un monde mystérieux dont on ne sait rien en général, mais sur lequel on a énormément d'idées reçues, très codifié, très coloré, avec sa musique, un rituel effrayant, ce qui, en principe devrait nous rendre curieux, non?

   Etes-vous sûr de pouvoir passer outre les préjugés? Oui? Vous en êtes certains?

Et si je vous dit que cette toile de fond c'est la tauromachie?

Ah, on fait moins le malin! (la honte, l'horreur, primitif, odieux, même pas en rêve...), oui, le thème est gonflé, mais j'ai parlé d'originalité, d'insolite, de curiosité, de dépaysement, on est bien d'accord, ça nous change du bureau, de la ville, mais rappelez-vous, je ne suis pas là pour vous convaincre de quoi que ce soit, ni pour ébranler vos convictions!

Et bien vous avez tout ce qu'il faut pour passer un bon moment de lecture hors du commun.

Vous n'aimez pas la corrida?

Non, vous la détestez?

On s'en fout, ça ne parle pas de ça!

Non, ce n'est que le décor. C'est comme si vous disiez qu'une histoire dont les principaux personnages travaillent dans une banque était un cours d'économie monétaire internationale. Oui parfois, on vous parlera du département "fusion et acquisition", de "traders", de "cotations" mais ça ne fera pas de vous un expert en la matière, vous vous sentirez toujours aussi stupide devant la page boursière de votre journal préféré. pourquoi? Parce que ce qui nous intéresse, c'est comment la belle Pamela va enfin se faire sauter par l'odieux directeur du département "fusion et acquisition"! Ah non, zut, nous revoilà dans l'histoire standard du début!

Mais vous comprenez mon idée.

  Bien sûr, vous me voyez venir avec mes gros sabots, oui, je parle d'Andalou, mon roman.

Pourquoi je vous raconte tout ça? 

Parce que lorsque j'ai écrit Andalou, j'ai voulu imaginer une histoire originale qui sortait un peu du schéma habituel des romans que je lisais. J'en avais assez de deviner la fin du livre à partir de la troisième page, et c'est réussi, promis, vous ne saurez pas qui trucide les ex maîtresses du grand séducteur avant la fin de l'histoire. C'est ce qui compte non?

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