Scottish trip

Cette fois, pas de sujet à controverse, une romance pure et douce!

Douce et rock'n roll quand même!

Juliette a une vie organisée, sérieuse, laborieuse. Elle forme un couple étonnant avec Stéphane, musicien, prof de musique mais aussi chanteur dans un groupe de Rock celtique qui vivote sur la scène du Fergus, un pub irlandais de sa ville.

Juliette rêve d'Ecosse, de lande et de loch. Mais c'est un cauchemar qui l'attend en débarquant à Édimbourg: son prince charmant la largue dès leur arrivée sur le sol écossais!

Que faire? Rentrer chez elle en pleurant toutes les larmes de son corps ou bien poursuivre ce voyage en solitaire?

Voyager seule n'est-il pas le meilleur moyen de faire des rencontres?

 

Au fil de l'histoire

Je vous propose une petite balade écossaise au fil de l'histoire de Juliette que vous découvrirez dans Scottish trip.

Si vous êtes sages, je vous laisserai quelques extraits pour vous donner envie, les décors qui m'ont inspirée, de quoi patienter jusqu'à sa sortie.

Édimbourg: Une histoire se termine...mais une autre commence!

Il était environ 17 heures. Les gens sortaient du travail en costume et s’agglutinaient aux arrêts de bus qui longeaient l’avenue. Une pluie fine s’était mise à tomber, mais personne ne semblait l’avoir remarqué sauf elle, la Frenchie sans parapluie. 

Elle ne comprit qu’à cet instant qu’elle se trouvait en Écosse, le pays de ses fantasmes romantiques d’adolescente. Certes, la musique n’était pas celle des cornemuses, mais l’ambiance du pub donnait le change : l’atmosphère feutrée, le rire puissant des hommes accoudés au comptoir, la machine à sous abandonnée au profit de l’écran lumineux des portables, la cible d’un jeu de fléchettes accrochée dans un coin sans passage, les vieilles publicités de bières qui recouvraient le mur près d’elle.

Longlochhead

Kookie Style était situé dans la rue principale du village, juste en face du poste de police. Juliette se demandait à quoi les flics pouvaient bien occuper leurs journées dans ce trou perdu. Il n’y avait qu’un restaurant, un pub, la poste qui tenait lieu d’épicerie et le salon de coiffure. Elle ne voyait pas comment une bande de voyous aurait pu survivre dans un environnement si chaleureux et convivial. Ces deux mots s’évanouirent dès qu’elle fit tinter le carillon de la porte, en entrant dans le salon. 

Mais Juliette ne l’écoutait plus. Ils venaient de passer un col, la route s’élargissait sur un paysage à couper le souffle : le Glen Coe. Finie, la petite Suisse verdoyante aux vallons boisés. Les arbres se faisaient rares, la terre devint aride, spongieuse, parsemée de flaques, brillant comme des pierres précieuses dans des écrins de tourbes. La roche noire des montagnes contrastait avec la blancheur de la neige déposée la nuit précédente. Le tout était rehaussé par le brun des fougères, séchées par l’hiver. Ils venaient de pénétrer dans les Highlands, et ce qu’elle voyait dépassait largement ses fantasmes les plus romantiques. C’était grandiose. La neige tombait encore par endroits, déployant des nuées blanches éclairant les abîmes insondables qui servaient d’horizon. Les glens, ces vallées sculptées par la puissance d’anciens glaciers, offraient une profondeur de champ qui donnait le vertige.

Le vent était toujours présent, mais les couleurs s’étaient réveillées brutalement. Ils arrivèrent dans le joli village d’Arsaig. Elle en profita pour se dégourdir les jambes en marchant jusqu’à la jetée qui abritait un semblant de port aux maisons blanches, collées les unes aux autres. Eno l’attendit au chaud. Il connaissait cet endroit et il ne le trouvait pas plus exceptionnel que tous ceux qui avaient fait l’admiration de Juliette. Ils repartirent au bout d’une demi-heure.

— C’est bien que tu aies accepté de piloter ma voiture, sans ça, je serais rentrée à Édimbourg.

— Ça m’a rendu service. Tu ne crois pas que tu aurais fini par t’habituer à conduire à gauche ?

— Non. C’est effrayant, je ne comprends déjà pas comment j’ai pu avoir une idée aussi folle !

Il lui sourit.

— Oh my God ! Faire deux cents kilomètres sur la gauche de la route, mais c’est absolument incroyable ! s’exclama-t-il, en se moquant.

Cela ne l’amusa pas.

— Tu as raison, je suis ridicule, ça n’a rien d’un exploit et pourtant, tu n’imagines pas combien c’est loin de ma vie de faire ce genre de truc !

Son air grave fit cesser le rire d’Eno.

— Tu fais quoi, d’habitude ?

Elle fit une pause, perdant son regard dans la lande. Quelle bonne question, se dit-elle, celle que j’aurais dû me poser plus tôt. Elle se ressaisit et commença : 

— D’habitude, je suis une fille sage, réfléchie, sans la moindre fantaisie.

— Cool, tu t’es transformée et en une seule nuit ? commenta-t-il, hésitant à poursuivre sur un ton moqueur.

— Non, évidemment. Tu parles d’une révolution ! J’en ai marre d’être ce que je suis !

— Et tu es ?

— Ce que maman voulait que je sois. J’ai un bon job, des responsabilités, une paye confortable, je suis à l’abri du besoin. Le seul moment où je me suis éloignée du chemin tracé, c’est en fréquentant Steve, mon ex. Et voilà, il m’a quittée, c’est maman qui va être contente !

— Pourquoi ? Tu sortais des sentiers battus avec lui ?

— Parce qu’un musicien de rock, ce n’est pas précisément ce qu’elle avait rêvé pour moi ! Maintenant, je vais essayer de me trouver un comptable, ou un administrateur. Un type bien chiant, quoi !

— Toi, tu as l’art de mettre de la gaieté dans ton quotidien ! 

— J’ai passé ma vie à tenter d’être la fille idéale, sans jamais m’attarder sur ce que je voulais, moi. Du coup, j’ai l’impression de ne plus savoir qui je suis, c’est terrible !

Vers 23 h 30, il se rhabilla et descendit au bar, une petite pièce chaleureuse cachée derrière l’escalier monumental. Cinq personnes étaient là et sirotaient leur breuvage sans une parole, seule la musique apportait un peu de vie. Il pensait y rencontrer plus de monde et, surtout, plus d’animation. Il hésita à prendre un verre dans cette atmosphère sinistre. Un homme au physique sévère était calé dans un coin, entre le comptoir et la porte de service. Une femme blonde d’une cinquantaine d’années était accrochée au bar. Elle exposait son généreux décolleté, les seins posés sur le zinc, au point qu’il s’attendait à l’entendre crier « ils sont bons, mes melons, ils sont bons ». Le couple d’amoureux, les yeux toujours rivés à l’écran de leur téléphone (regardaient-ils des pornos pour se mettre en condition ?) était assis à une des deux tables disposées le long du mur. Enfin, le barman, un grand bonhomme tout en rondeur, astiquait ses verres, en gardant un œil sur une partie de snooker diffusée à la télévision.

— Approchez, n’ayez pas peur ! dit l’homme austère, d’une voix éraillée qui lui rappelait la sienne au lendemain d’une finale de rugby entre le Stade français et Toulouse.

Il prit place sur un tabouret, entre la femme et l’homme. Il s’adressa à ce dernier :

— Soirée match, hein ?

— Cancer de la gorge ! répondit ce dernier en s’esclaffant.

Il sentit le sang empourprer son visage.

— Désolé, je ne…

— Ne le soyez pas, vous n’êtes pas l’inventeur de la cigarette !

— Qu’est-ce que je vous sers ? se renseigna le barman.

— Un whisky !

Les trois se mirent à rire si fort qu’il en avait mal aux oreilles. La toux caverneuse de l’homme dominait le brouhaha et il craignit un instant que celui-ci finisse par se débarrasser définitivement de ses poumons. Il se demandait ce qui avait suscité cette hilarité soudaine.

— Mon chou, regarde l’étagère derrière Brad, il y a environ soixante-dix bouteilles de whisky et aucune n’est identique. Alors, il va falloir que tu précises. Et je te déconseille de commander un Jack Daniel’s, si tu tiens à ta vie, commenta la femme.

En passant à côté de Kensaleyre, Juliette fixa la mer si accessible et si calme, qu’elle avait envie de s’y baigner.

— C’est quoi, ici ? La mer du Nord, l’Atlantique ?

— C’est un recoin de l’Atlantique, la mer des Hébrides, on l’appelle « le little Minch ».

— Je n’ai jamais nagé dans la mer des Hébrides !

Contrairement à sa suggestion de se rouler dans la mousse, cette fois, elle savait très bien ce qui suivrait, ou du moins, l’espérait-elle. Andrew mit le clignotant et immobilisa la voiture sur un petit terre-plein près d’une plage, il coupa le contact et lui jeta un regard amusé. Le soleil leur accordait une faveur. Sans un mot, il sortit, elle en fit autant. Il prit une serviette qu’il avait eu la bonne idée de conserver dans le véhicule et lui saisit la main. Ils dévalèrent un étroit sentier, caché par les oyats, et débouchèrent sur une plage minuscule. L’Écossais commençait à se dévêtir en l’observant à la dérobée.

— Tu es sûre de toi ? L’eau ne doit pas être à plus de huit degrés et dehors il fait à peine douze, si le soleil se maintient !

Évidemment, elle n’était sûre de rien, mais elle ne voulait pas reculer devant la joie de faire un truc dingue. Cap, bien sûr ! Pour toute réponse, elle se dévêtit, elle aussi. 

— Tout ça parce que tu ne peux pas attendre quelques minutes de plus pour mater mon corps d’athlète ! Ah, les Françaises !

Le chanteur était une chanteuse, plutôt jolie d’ailleurs. C’est à elle qu’il demanda s’il pouvait se joindre à eux. Bien sûr, elle ne le crut pas lorsqu’il avoua avoir joué avec JakeMacArthur. Elle le regardait comme le type lourd qui voulait absolument chanter sa chanson fétiche : il y en avait un dans chaque village et, ce soir, il était français. Ça la fit rire, elle le trouva charmant et finit par céder.

Elle changea de tête quand il entama les premières notes de Wild, le plus gros tube du groupe écossais. Elle lui renvoya un sourire prometteur et leur tour de chant se transforma en véritable concert de rock. Au lieu d’écouter de la musique destinée à couvrir les bruits de fourchette et de verres, les clients se rapprochèrent et vinrent encore plus nombreux. Le patron fut obligé de maintenir les portes ouvertes pour ne pas voir son public suffoquer. Puis, l’un d’entre eux raconta que la sœur de l’employé de la belle-mère de son oncle était allée au concert à Édimbourg et qu’il y avait bel et bien un groupe français en première partie. Jess, la chanteuse, changea de regard. C’était une belle blonde platine, elle arborait des cheveux peroxydés, courts et ébouriffés ; elle avait les yeux charbonneux et la bouche rouge écarlate d’une rockeuse. Steve aimait sa dégaine de rebelle. Elle portait à merveille le bustier échancré, la minijupe en jean, les collants résille et les talons aiguilles. Ils firent une pause vers 23 heures. Le patron leur offrit une bière, conscient que ce concert resterait gravé dans l’esprit des habitants de Portree.

 

... to be continued!