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Après la fin: l'enfer!

Voilà, c'est fait et vous pouvez en être fière, vous venez d'écrire le mot "FIN" en bas de la dernière page de votre roman. Vous avez écrit pendant des mois et des mois, réécrit, relu, corrigé, réécrit  à nouveau, pour être sûre et enfin aujourd'hui ça y est, vous allez enfin pouvoir le livrer à nos yeux impatients.

Vous passez encore deux ou trois jours à finaliser la couverture, puis à faire entrer votre manuscrit dans les cadres numériques du vendeur/éditeur et ça y est, sonnez hautbois résonnez musette, il est en ligne votre divin enfant!

Il ne vous reste plus qu'à attendre le chaland qui va, vous en êtes suis sûre, se ruer sur une si belle histoire.

Et vous attendez,.

Vous attendez longtemps, désespérément et puis rien, keutchi, nada!

Votre courbe des ventes ressemble à l'électroencéphalogramme de Nabila: plat!

Comme vous n'êtes pas une sombre rêveuse totalement demeurée, vous vous tournez vers les conseils avisés des autres, de ceux qui ont la clef du succès, du moins, c'est ce qu'ils écrivent en haut de leurs blogs, page FB et couverture de bouquins.

Et c'est parti!

Je ne reviens pas sur le fait d'écrire en français, sans fautes, sinon vous jetez l’opprobre sur toute la profession, avec rythme, avec une bonne histoire, ça, vous vous en êtes préoccupé.

Non, ce qu'on vous demande maintenant, c'est d'être un pro de la vente, le parfait petit commercial de votre talent. Ce qui, à moins d'être très imbu de vous même, ne va pas être une évidence. Mais c'est ainsi, les auteurs ne sont plus ces silhouettes mystérieuses qui refusent toute médiatisation, ce sont des communicants chevronnés.

Règle n°1: Bien soigner sa couverture! Il vous semble déjà avoir fait le nécessaire, votre couverture est originale, elle sort un peu du lot, pour qu'on la remarque, même en petite vignette sur l'écran d'un ordi.

Grossière erreur! Vous devez respecter les codes du genre dans lequel vous écrivez.

Pour vous faire remarquer, vous devez absolument ressembler aux autres! Oui je sais, je simplifie mais c'est assez ça. Pour sortir du lot, noyez-vous dans la masse sinon, l’œil aguerri de vos lecteurs potentiels ne vous reconnaîtra pas comme cible!

Donc, si vous écrivez de la romance, optez pour des lettres roses ou bleues et choisissez un très beau buste d'homme musclé.

Si c'est de la dark romance, ajoutez un tatouage sur ce corps de rêve et une photo noir et blanc

Si c'est de la bit-lit, n'oubliez pas la goutte de sang dans le cou ou au coin des lèvres.

Si c'est de la young adult, floutez un peu la photo, de la new romance soit vous mettez une main de femme sur ce beau buste, soit vous casez des menottes ou des cordes quelque part! Si c'est du M/M, doublez le personnage masculin...

 

Règle n°2: pour vous faire connaitre créez votre page FB ou votre blog!

Créez votre blog et votre page FB, pour que vos fans puissent vous retrouver et nouer des liens avec vous! Un détail semble alors sortir de la tête de vos conseillers: vous n'avez pas encore de fan!

Mais certes, vous obéissez puisque vos ventes sont toujours au plus bas.

Et 3 semaines après, vous déprimez encore plus parce que les visites sur votre blog sont aussi nombreuses que les chicos dans la bouche d'une animatrice TV.

Vous allez maintenant devoir affronter la double tâche de faire connaitre votre livre ET votre blog, et la double frustration de ne pas y parvenir!

 

Règle n° 3: pour vous faire connaitre, n'hésitez pas à solliciter les blogeurs spécialisés

Vous envoyez des SP (service presse pour les néophytes, c'est à dire des livres gratuits) aux différents chroniqueurs, blogueur qui parleront de votre livre!

OK! Vous distribuez tout un tas de versions numériques de votre oeuvre à ces mystérieuses personnes qui mettrons des mois à lire votre bébé et qui, dans le meilleur des cas, publieront un billet sur leur blog. Et vous vous poserez la question par laquelle vous auriez dû commencer: mais qui lit ce blog?

Et, en reluquant, le soir à la veillée, votre page vente sur amazon, vous aurez la réponse: personne.

Parce que des blogs littéraires, il y en a des centaines et très peu sont indépendants. Ils ne veulent pas perdre le soutient des ME plus prestigieuses que vous (maisons d'éditions) qui les abreuvent de bouquins, alors ils présentent ces bouquins-là en priorité.

Le bon côté quand même, c'est qu'avec un peu de chance, vous aurez une jolie chronique de votre histoire et vous pourrez la publier dans votre blog ou votre page FB, twitter, instagram... ça, c'est bon pour votre ego qui en a bien besoin! (et rien que pour cela, je les en remercie)

 

Règle n°4: Allez là où sont les lecteurs!

Mais oui, où sont-ils ces foutus lecteurs qui ne voient pas votre jolie couverture leur faire des signes d'invitation?

Immiscez-vous dans des groupes de lectrices ou de chroniqueuses littéraires, sur FB par exemple, vous suggère-t-on.

OK, après quelques recherches, vous débarquez sur une demi douzaine de groupes où d'emblée on vous fait lire le règlement qui dit très clairement: Auteurs, ne commencez pas à nous saouler avec vos pubs de bouquin ou bien c'est la porte!

Ça commence mal mais vous y allez quand même, histoire de rencontrer malgré tout de potentielles lectrices. Et là, vous comprenez que :

a) Soit cette page n'est qu'une extension discrète d'une maison d'édition (ou d'un auteur) et qu'on retaclera systématiquement tous les autres bouquins.

b) Soit les lectrices en question consomment éternellement les même histoires et ne veulent pas en changer. Donc, vous qui vous êtes creusé le ciboulot pour écrire un truc différent en un seul volume, vous n'avez aucune chance de les détourner de la série des frère Atkins en 8 tomes ou des "secoue-moi, attache-moi, dompte-moi...", ou des "beautiful greluche" à moins d'en écrire une copie conforme.

Mais finalement, vous ne vous découragez pas et dégotez 3 pages FB où vous êtes la bienvenue en tant qu'auteur. Vous vous réjouissez, commencez à discuter avec cette communauté bien sympathique jusqu'au moment où vous comprenez que ce sont tous des auteurs et qu'aucuns d'eux n'est là pour vous lire mais comme vous, ils espèrent être lus!!!

Règle n°5: ne soyez pas trop lourdingue!

On doit vous voir mais vous ne devez pas envahir les autres avec votre pub!

Oui, je sais, vous êtes au bord de la crise de nerf, hésitant en permanence à parler de vous aux autres de peur de les faire fuir. Imaginez les dégâts que cela peut faire dans votre comportement: le naturel est parti au galop, vous passez votre temps à évaluer votre taux de présence. Puis au fur et à mesure, vous ne parlez plus de vous, parce que vous êtes sûr de saouler tout le monde!! A force d'être contenu, votre ego se ratatine et devient invisible.

Exister mais pas trop, pas trop fort...

 

Jour après jours, vous finissez par trouver du charme à votre bouteille de rhum, ou à votre stock de chocolat, ou à votre chat qui tente de vous sauver à grand coups de ronrons deséspérés.

Vous vous torturez l'esprit avec de sombres idées comme " moi aussi, je vais leur en écrire des histoire de saintes nitouches qui font marcher un millionnaire sur la tête, puis dans le deuxième tome, il se tapera son garagiste puis dans le troisième, il finira dans un gang de bikers pour échapper à la vengeance du frère de la sainte nitouche ...(je vous défends de me piquer l'idée, hein!)".

Ou bien "oui, je vais investir dans les pubs FB, les opérations amazon vendez vos livres gratuitement, je vais arroser toutes les chroniqueuses de France avec mon chef d'oeuvre..."

 

Et puis une nouvelle histoire germera dans votre tête, vous reprendrez votre clavier et vous vous laisserez emporter par vos personnages, une nouvelle fois.

Vous accepterez qu'écrire vous permette de briller parfois en société,( surtout si le champagne coule à flot et qu'il se fait tard) mais pas au box office.

Si vous écriviez pour devenir le prochain best-seller, vous abandonnerez et vous vous consacrerez peut-être à la chanson pour passer dans "the voice".

Si écrire de belles histoires vous rend heureux, alors vous continuerez pour votre plaisir, parce que rien ou pas grand chose ne pourrait vous en dégoûter!

Tant pis si vos lecteurs se comptent sur les doigts d'une main, vous serez ravi de découvrir qu'ils vous suivent, livre après livre, année après année. Quelques fois, vous aurez même envie d'écrire des histoires rien que pour eux. Peu importe, pourvu que vous y preniez du plaisir et que vous y mettiez la ferveur nécessaire.

Et puis un jour, peut-être...

 

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